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12 janvier 2010 2 12 /01 /janvier /2010 23:00

Réédition dans le cadre du défi n° 20 de l'Abeilles50 "SOUVENIR D'ENFANCE :

Ecrire un texte (en vers ou en prose)
qui contera un(des) Souvenir(s) d'Enfance...


Souvenir d'Ecole, Souvenir de Fête(s), Souvenir de Camarade(s),
Souvenir d'Amour juvénile, Souvenir d'un Lieu
... agréable ou désagréable...
pitchounette_web.jpg

- 1 - Pitchounette


Je ne la connaissais que de nom. Mais les rares fois où il apparaissait dans les conversations, les adjectifs "excentrique" ou "originale" la qualifiaient immanquablement.

Je savais d’elle qu’elle avait vécu plusieurs années en Algérie où elle avait suivi un homme, qu’elle était mère célibataire, habitait en banlieue parisienne et exerçait la profession de relieur.

De nos jours, cela passerait pour être d’une banalité navrante, mais au début des années 60, pour une famille ouvrière ch’timi, où le mot d’ordre de mon père, était "ne pas se faire remarquer", et "ne pas entrer dans la langue des gens", tante Odette, faisait un petit peu "tâche" dans notre univers de transparence.

-"Dis papa, c’est quoi ec-san-crite ?" Il brandissait alors au-dessus de sa tête, la main pour la faire danser telle une marionnette, en prenant garde que maman ne le voit pas.

Je m’attendais donc à ce que la sœur de ma grand-mère maternelle, soit une espèce de "foldingue".

A l’aube de mes 5 ou 6 ans, la première fois que je l’ai vue, sortant de sa 4L, j’ai su qu’une femme de cette classe là, serait à tout jamais mon idole.

Elle était assez grande et bien bâtie, habillée d’un tailleur style Chanel, dans des nuances de beige et de marron clair, sac à main et escarpins assortis, collier de perles fines et lunettes au bout d’une chaînette d’or, posés sur la poitrine, les cheveux permanentés et brushés à la Margaret Tatcher.

Elle avait ce rire cristallin et moqueur de ces gens insouciants, épris de liberté, et ce petit nom de "pitchounette" qu’elle me donna avec un gros baiser sonore, résonne encore dans ma mémoire.

dauphine.jpg

 - 2- Morangis -

 Après quelques années de patience et de tergiversations, papa céda.

Nous nous entassâmes à cinq dans la Dauphine, direction Morangis.
Aux copines, j’avais préféré dire que j’allais à Paris : çà faisait mieux.
De toute façon, ce n’était pas un vrai mensonge, puisque heureuse de nous recevoir enfin, tante Odette s’improvisa guide, et nous fit découvrir fièrement, tous les monuments de la capitale, que nous ne connaissions qu’en photos.

Cette petite excursion fut décisive pour mon frère, alors adolescent : il serait Parisien !
La vie lui a d’ailleurs donné raison.

J’étais personnellement davantage séduite, par le petit pavillon banlieusard, prolongé par un atelier de reliure (dont on m’avait interdit l’accès)le tout s’ouvrant sur un magnifique jardinet et une pelouse.

Peu habitué au va et vient d’une gamine d’une douzaine d’années, le cerbère de ces lieux, Sherekhan, un jeune berger allemand, agacé par le bâton que je tenais à la main, fut pris d’une pulsion sauvage, et me sauta à la gorge.

Je ne dus mon salut qu’au fils de tantine, que je n’avais encore jamais rencontré, et qui, alerté par les grognements rageurs, vint me délivrer des crocs du monstre, tel le prince charmant de mes livres de contes.
Il était grand et mince. Sa peau blanche contrastait avec ses cheveux et son collier noirs de jais. Il était élégant et racé comme sa mère.

Michel était alors marié à une violoniste du Conservatoire de Paris.
Je garde un souvenir mémorable du spectacle auquel nous assistâmes après le dîner :
les doigts de ma tante, couraient avec légèreté sur le clavier du piano à queue qui trônait dans le séjour, pour accompagner sa bru, sur un morceau de musique classique qui me fit basculer dans une dimension auditive, dont j’ignorais tout.

Jusqu’alors essentiellement bercée par le son nasillard du piano à bretelles où de l’harmonica de papa, ce séjour chez mon aïeule m’avait ouvert les yeux et les oreilles sur des horizons nouveaux qu’il me tardait d’approfondir.

A notre retour dans le Pas de calais, je m’inscrivis à l’école de musique communale.

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- 3 - Moyrazes -

 La mode des vacances “utiles” et “créatives” s’abattit sur la France.

Tante Odette, toujours en avance sur son temps, avait pressenti l’événement et était partie s’installer dans un minuscule village de l’Aveyron, à une dizaine de kilomètres de Rodez.

Elle avait acheté une grande maison de pierres, située dans le creux d’une vallée, à proximité de la rivière.

Cette demeure très typique avait la particularité d’être paradisiaque l’été pour les amoureux de la nature et de la pêche à la truite, mais totalement inaccessible l’hiver.

Les gens du pays eurent tôt fait de la prendre, eux aussi, pour une excentrique.

Que penser d’autre d’une femme d’une cinquantaine d’années, capable de vivre seule avec son chien, terrée chez elle toute la mauvaise saison.

Le fermier, propriétaire du château qui surplombait la vallée, palliait aux urgences, en lui déposant ce qu’elle lui avait demandé par téléphone, sans qu’il ose toutefois descendre de son tracteur, craignant à raison Sherekhan, que cette vie de reclus ne favorisait pas à rendre plus sociable.

Tous semblaient néanmoins aimer et respecter cette marginale qui dispensait ses cours de reliure d’art de juin à septembre et favorisait la “transhumance” de médecins, cadres et chefs d’entreprise de la Capitale et autres grandes villes, jusque chez eux.

Elle contribua ainsi à relancer pendant ces quelques semaines, l’économie commerciale, hôtelière, gastronomique et touristique du Rouergue.

Afin de divertir “ses élèves”, elle organisait des expositions, concerts, soirées feux de camps et folkloriques qui amenaient des quatre coins de France et même du monde, des artistes peintres ou musiciens, des archéologues, collectionneurs... dans leur région jusqu’alors si tranquille... trop tranquille.

Tante Odette devint une sommité régionale.

ATELIER_web.jpg
 
- 4 - La Sauvagère

 Quelques images de son petit “paradis”, me reviennent souvent depuis ces merveilleuses vacances.

Ma tante avait voulu conserver le caractère très rustique de la pièce principale : murs et cheminée en pierres brutes, avec un énorme chaudron en fonte noir, une gigantesque table et ses deux bancs en bois massif, un buffet assorti, gorgé de confitures et conserves naturelles en tout genre, et dans le fond de ce séjour-cuisine, un saloir où pendaient une multitude de jambons et saucissons de pays.

La pièce d’à côté avait ma préférence pour sa décoration plus chaude. Sur les murs crépis étaient accrochés de magnifiques peintures d’impressionnistes, que j’avais plaisir à contempler. Des fauteuils en tissu confortables, étaient installés face à une autre cheminée plus stylée. Le piano qui me fascinait toujours autant y trouvait naturellement sa place, et, sur le côté, un grand escalier conduisait mes pas jusqu’à la magnifique et immense bibliothèque en mezzanine.

J’y serais restée des heures entières. Elle devait contenir à elle seule, le double des livres que celle que ma commune mettait à la disposition de tous ses habitants.
Une délicieuse odeur de cuir et de papiers anciens emplissait mes narines.
J’effleurais les livres sans oser en déranger un.**

Tante Odette avait remarqué mon émotion face à toutes ces richesses culturelles.
Elle sortait un bouquin de sa rangée avec d’infinies précautions, le qualifiait d’un superlatif, tournait une page ou deux pour en choisir un passage qu’elle me lisait à haute voix.
Elle le replaçait et renouvelait ainsi plusieurs fois l’opération.
Je crois bien qu’elle les connaissait tous par cœur. Il lui arrivait même de m’en dire quelques lignes, où d’en réciter une poésie, rien qu’en le pointant du doigt.

Elle m’en glissait finalement un entre les mains, que je dévorais le soir même, dans la petite chambre mansardée qu’elle m’avait attribuée.
Son choix était à chaque fois judicieux et comblait mes attentes.
Je lui exprimais le lendemain matin, les sensations que m’avait procurées l’œuvre conseillée.

Elle jugea alors que j’étais apte à pénétrer dans son atelier de reliure.

 ** voir le texte "les murmures de la forêt"

cousoir.jpg
- 5 - Une histoire d’Amour

 J’ai compris au fur et à mesure de ses explications, que la reliure d’art n’était pas qu’un simple métier.

C’était avant tout une histoire d’amour entre l’homme et le livre.

Pour obtenir un travail parfait (le bien fait n’aurait pas été suffisant) il fallait une infinie patience, de l’élégance dans les détails et du goût pour les proportions.

Chaque étape, chaque geste, chaque moment déterminaient la qualité finale du résultat.

La première opération consistait à vérifier l’état du livre, le collationner, le nettoyer, le débrocher. Choisir avec soin le fil de lin selon l’épaisseur et le type de papier des cahiers, afin de préparer le cousoir.

Le choix de la nature et de la couleur du cuir et celui du papier de recouvrement, devait refléter le caractère du livre.

Rien ne devait être laissé au hasard. Aucun empressement n’aurait été tolérable. Du respect des temps de séchage et de mise sous presse dépendait la réussite de l’ouvrage.

C’était à la fois, un travail de restauration, de chirurgie, de couture, de création.

Jusqu’alors j’aimais lire.
A partir de celui où j’ai accouché de ma reliure, j’ai aimé les livres.

Tante Odette, paraissait très satisfaite de sa jeune stagiaire, et déplorait que la distance m’empêchât de poursuivre dans cette voie pour laquelle j’avais d’indéniables dispositions.

Comme tout était toujours simple avec elle, elle expliqua à mon père comment me fabriquer un cousoir, une cisaille et une presse et promit de m’envoyer, dès que j’aurais été en possession de ces outils, les quelques instruments et matériaux indispensables pour me permettre de relier chez moi.

Papa acquiesça et prit des notes qu’il glissa dans sa poche pour lui faire plaisir, pour me faire plaisir.

J’y ai cru quelques heures, le temps du retour jusqu’à la maison.

Sherkhan.jpg

 
- 6 - (Fin) L’écriture en héritage

 Je ne sais comment ils ont fait pour braver Sherekhan, mais un jour on retrouva Tante Odette sur le plancher de sa chambre. Elle avait été victime d’une congestion cérébrale, qui lui paralysa la main droite et lui diminua considérablement la vue.

Son fils constatant les irrémédiables séquelles malgré de longs mois de rééducation, dut se résoudre à vendre La Sauvagère et laisser sa mère dans un foyer pour personnes handicapées.

Six ans s’étaient écoulés depuis mes “vacances insolites”**.
Elle déclina l’invitation à mon mariage pour des raisons de santé évidentes. De toute façon je n’aurais pas supporté de voir cette femme pleine de vitalité, diminuée... et pourtant !

Certes si elle ne pouvait plus se déplacer, son cerveau intact, persistait à bouillonner d’idées. Elle continua à œuvrer activement pour différentes associations notamment pour le MRAP (association anti-raciale).
Elle orchestrait par téléphone ses rendez-vous dans la chambre de son Foyer, prenant comme secrétaires les aide-soignantes qui se prêtaient à son jeu.

Le reste du temps, elle écoutait de la musique et elle écrivait, faute de n’avoir plus l’acuité visuelle nécessaire pour lire.
Maman qui savait mon penchant pour la rédaction de quelques poèmes, lui en fit part, et me transmit sa demande de lui en faire parvenir. Ce que je fis.
Elle me téléphona aussitôt pour me dire son enthousiasme, si heureuse de voir, qu’il y avait au moins une personne “normale” dans cette famille.

Toujours très convaincue que le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt, elle m’appela dès lors, systématiquement tous les dimanches matins, à 8 heures précises, sans que je ne puisse l’en faire changer, pour débattre sur certains textes ou faits d’actualité.

Afin de préserver mon équilibre conjugal je dus me résoudre à débrancher le téléphone, et de n’avoir de ses nouvelles que par l’intermédiaire de ma mère.

Je n’ai donc plus jamais eu l’occasion d’entendre le son de sa voix rieuse.

La vie m’emportant dans son grand tourbillon, j’ai durant de longues années cessé d’écrire.

J’ai appris il y a quatre ans, que tante Odette s’en était allée rejoindre les poètes qu’elle affectionnait.

Depuis ce jour là, je ne peux expliquer les raisons qui me poussent à reprendre la plume.

A moins que... 
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 Claudie Becques

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15 mars 2009 7 15 /03 /mars /2009 09:29
Texte écrit pour la communauté "Ecriture Ludique" Défi n° 37 proposé par Michel,"Ecriture sur image" :

L'image sélectionnée est suffisamment parlante pour se passer de commentaires explicatifs. Laissez-vous donc inspirer, et entrainez-nous à votre suite dans ce qu'elle vous aura dicté :-)
Aucune contrainte, à part votre imagination :-)

 Ombre et rocher" - Alexandre Koening

_______________________________________

Alter ego

J'avais emménagé depuis peu dans ce petit village.

Trop lasse de la ville grouillante de solitude, j'avais préféré m'exiler sur la terre de mes aïeux aujourd'hui disparus, mais à chaque fois que je courais la campagne, certains parfums, quelques couleurs, divers endroits ravivaient en mon âme des souvenirs que je croyais à tout jamais enfouis.

C'est lors de ces champêtres escapades que je l'ai croisé.

C'était un gamin un peu sauvage que je voyais souvent passer devant chez moi, pour courir vers quelques mystérieux rendez-vous.

Ce jour-là il s'était abrité de la pluie sous un immense pin parasol et tapait rageusement le sol du bâton qu'il tenait à la main :

-  "Bonjour !

-   B'jour.

-   Ca n'a pas l'air d'aller…

-   Pfff ! Il pleut !

-   Oui… Et alors ?

-   Quand il pleut mon frère, il a pas le droit de sortir !

-   Ah ! Alors tu t'ennuies ?

-   Ben oui."

 

Je le regardai étonnée parce que je ne me souvenais pas l'avoir vu accompagné

-   "Il est plus petit que toi ?

-   Non ! C'est mon jumeau… on est tout pareil, s'empressa-t-il d'ajouter des étoiles dans les yeux, on est frère quoi !"

 

Je sentais qu'il était préférable d'éviter de poser trop de question, que l'enfant se refermerait aussitôt dans sa bulle, aussi pris-je congé en lui confiant dans un sourire :

-    "Demain le soleil brillera, tu pourras jouer avec lui."

 

Il ne dit rien, mais je pus lire dans ses yeux une immense reconnaissance et, bien qu'il ne sourit pas, quelque chose illumina son visage.

Il me rendit vaguement le signe de la main que je lui adressai en m'éloignant, tandis que s'installaient  au fond de mon cœur un grand vide, et, dans la tête, la ferme intention de percer le mystère de ce gosse qui m'intriguait.

 

Le lendemain matin, j'eus la satisfaction de ne point me voir être trahie par la météo, puisque le soleil caressait chaleureusement la garrigue.

Dire que mes premières pensées furent pour l'énigmatique garçonnet eut été mentir, puisqu'il n'avait en fait jamais quitté mes pensées depuis le pin parasol.

 

Je m'habillai à la hâte et me surpris à guetter son passage derrière les rideaux.

Quand je le vis enfin, je décidai de le suivre en laissant toutefois quelque distance pour qu'il ne puisse s'apercevoir de ma présence.

 

Je compris qu'il empruntait le chemin qui menait au "Rocher des Fées".

Quand il s'en approcha, je le vis lever les bras comme pour aller se jeter dans d'autres, et il se plaqua contre la paroi rugueuse comme pour l'étreindre, puis il s'écarta et je le vis entrer dans une conversation animée avec son ombre.

De derrière le tronc du vieil olivier d'où  j'observais la scène, je le vis prendre une petite balle de sa poche et la faire rebondir sur la roche.

 

J'écoutais le rire cristallin de ce gamin débordant de vie qui n'avait rien en commun avec celui que j'avais croisé la veille.

 

Je ne pouvais détacher mon regard de ce joyeux spectacle qu'accompagnaient allègrement les cigales, et soudain, je m'aperçus médusée, que les mouvements de  l'enfant étaient complètement désynchronisés de ceux de l'ombre.

 

Honteuse de mon indiscrétion, je laissai alors les deux frères à leurs jeux, et rebroussai tristement chemin, plus seule que jamais.

 

Claudie Becques (21/04/08)
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27 février 2009 5 27 /02 /février /2009 18:15

      J'ai présenté cette nouvelle au concours Annie Ernaux 2006 sur le thème de "la passion". 
Elle n'a pas été primée et c'est seulement aujourd'hui que je viens de découvrir sur le net l'appréciation du Jury à cette adresse :
http://www.signets.org/ernaux_2006/thematique_adultes.pdf  (en page 8)
Il me semble que ce texte est moins nul que je ne l'avais pensé alors j'ai décidé de le publier ici.
_______________________________________________________________




-
          Mademoiselle ? Les gars ont terminé avec le rez-de-chaussée. Pouvons-nous enlever les meubles de l'étage ?"

 

Cynthia releva la tête et remonta de la main les mèches de cheveux qui l'empêchaient de voir son interlocuteur. Elle était accroupie sur le plancher de la chambre à coucher, occupée à entasser tout le linge dans des sacs plastique.

Elle se mit debout en soupirant :

-          "Oui, vous pouvez y aller, j'ai justement terminé. Soyez gentil, aidez-moi s'il vous plaît à descendre quelques-uns uns de ces paquets."

 

Elle savait que sa grand-mère aurait été d'accord avec ce choix de tout faire enlever par l'Association d'Emmaüs. Bien qu'elle n'ait jamais été très riche, elle avait toute sa vie durant, essayé de faire des dons pour différentes œuvres, selon ses faibles moyens.

 

La jeune fille aurait aimé garder tous ces meubles et objets qui avaient bercé son enfance, mais ils ne seraient pas  du tout intégrés dans le petit appartement dans lequel elle avait emménagé depuis maintenant deux ans.

Quand elle avait appris qu'on lui avait attribué ce poste de professeur de français titulaire, elle avait immédiatement pris un crédit pour s'offrir ce trois pièces-cuisine sur lequel elle avait flashé, parce que situé près du collège où elle enseignait et du jardin public où elle pouvait faire son jogging pour évacuer le stress des fins de journée.

Elle avait choisi avec soin la décoration aux chaudes couleurs africaines, et imaginait mal le buffet flamand sculpté de mamie Marcelle à côté de ses girafes en bois et son clic-clac rouge imprimé d'éléphants.

 

C'est donc la mort dans l'âme, qu'elle n'avait conservé que quelques bibelots qui lui rappelaient tant de souvenirs, rassemblés dans les trois cartons qu'elle avait déjà mis dans sa voiture.

 

Les déménageurs investirent les lieux et vidèrent rapidement les différentes chambres.

 

-          "Ce coffre en rotin Mademoiselle, nous l'emportons aussi ?

-          Oui j'ai laissé dedans les couvertures que grand-mère y entassait. Je suis sûre qu'elles seront aussi très utiles à votre association"

 

Cynthia jeta un coup d'œil circulaire dans les pièces maintenant vides, soupira et commença à descendre l'escalier quand l'homme la rappela :

-          " Dîtes-moi, ce coffre est bien lourd pour des couvertures…"

Intriguée, elle le rejoignit et souleva le couvercle :

-          "Pourtant regardez…"

Elle s'interrompit après avoir ôté de carré de laine qui recouvrait en fait une multitude de cahiers, carnets, agendas… qu'elle considéra très étonnée. Elle reconnut l'écriture très soignée de sa mamie sur les feuillets de tous formats.

Il semblait y avoir des années de journaux intimes. Ici, quelques carnets emplis de poèmes, dans ce cahier des histoires courtes, celui-ci des contes pour enfants…

Elle se souvenait de cette histoire de la petite feuille qui voyageait sur le vent…

-          "Alors ? s'impatienta l'homme, on l'emmène ?

-          Non, je le garde finalement, décida Cynthia. Pourriez-vous me le faire déposer dans le coffre de ma voiture s'il vous plaît ?

-          Pas de problème. Albert, tu prends l'autre côté ?

-          Merci Messieurs, je ferme derrière vous."

 

C'est ce qu'elle fit en effet, les yeux embués de larmes, mais néanmoins consciente d'emporter avec elle dans l'énorme panier d'osier, l'âme de cette maison dont elle allait maintenant déposer les clés chez l'agent immobilier et qui, dès demain, porterait la pancarte "A VENDRE".

 

La jeune femme passa quasiment toute la nuit à trier les documents de sa grand-mère, rassemblant sur un tas tous les agendas où la défunte avait consigné toutes ses journées, faits et gestes, observations diverses et même ses menus.

 

Cynthia était mal à l'aise en découvrant ainsi les pensées les plus intimes de son aïeule et se dit qu'elle les lirait plus tard, lorsqu'elle aura avancé dans son deuil.

 

Pour l'heure, elle préférait partir à la découverte de ses petits carnets de poèmes :

 

L'écriveuse

 

Je suis porteuse de ce virus

De cette maladie honteuse

In tolérée par vos us

J'avoue : je suis une écriveuse.

 

Profitant de votre sommeil

Moi je rêve sur le papier

Puisque les nuits portent conseil

Et que la lune est mon alliée.

 

Alors loin des sourires en coin,

Des sarcasmes et de l'ironie

J'écris des poèmes dans mon coin

Qui, le jour, font chanter ma vie.

 

Les mots sont mes rébellions,

Mes espoirs ou mon impuissance,

Ils expriment cette passion

Qui justifie mon existence.

 

Mais soucieuse de vous plaire,

Sans pour autant y renoncer,

Je me cache un peu pour ce faire,

Et éviter de vous blesser.

 

Je suis porteuse de ce virus

De cette maladie honteuse

In tolérée par vos us

J'avoue : je suis une écriveuse.

 

Pourquoi mamie Marcelle se cachait-elle pour elle ?

C'est vrai que malgré leur complicité, elle ne s'était jamais ouverte à sa petite fille sur cette passion.

 

-          "C'est quoi une passion Mamie ?

-          C'est quand on pense toujours à quelque chose ou que l'on se sent poussé à faire quelque chose. C'est une espèce de force irraisonnée contre laquelle on ne peut rien.

-          Ta passion c'est de faire des napperons ou de préparer des tartes aux pommes ? Tu en fais toujours…

-          Non ma chérie, ça c'est un passe-temps, une façon d'organiser son temps libre, de s'occuper les mains. Une passion, c'est au-delà de tout ça, c'est quand ça devient ta vraie raison de vivre.

-          Alors ta vraie passion à toi Mamie, c'est quoi ?

-          Toi, ma petite Pitchounette !"

 

Cynthia devait avoir une dizaine d'années quand elles avaient eu cette conversation.

Il faudra que je trouve l'agenda de cette époque-là, pensa-t-elle, sa grand-mère avait certainement dû noter quelque chose sur cet échange…

La jeune femme ne savait par où commencer tant il y en avait…

 

… J'ai toujours aimé lire, au grand désespoir de ma mère qui estimait que la lecture était oisiveté. Une femme avait à ses yeux beaucoup mieux à faire qu'à "se monter le bourrichon" dans des textes malsains. Aussi se chargeait-elle de me trouver une "vraie" occupation telle que le jardinage, le ménage, de la couture, du tricot…

 

Ainsi parlait Marcelle de son enfance.

 

Dans cet autre carnet :

 

J'aime la poésie depuis toute petite, elle me libère le cœur. Lorsque l'émotion est trop intense, il m'est indispensable de la déverser sur le papier…

 

Dans celui-ci, ce poème, ce cri du cœur sans doute destiné à Emile, son mari :

 

Désillusion

 

Moi, je croyais qu'aimer, c'était tout partager

Et qu'un bel unisson le temps devait forger ;

Que les années devaient calquer nos émotions…

Plus elles passent et plus grande est ma déception.

 

S'aimer ne veut pas dire avoir les mêmes goûts,

Mais de les respecter, n'en point montrer dégoût

Me semble être la base du bonheur parfait…

Sur ce point notre histoire a déclaré forfait.

 

Et si rien qu'une fois tu partageais ma joie,

Tu disais simplement : "Je suis heureux pour toi"

Qu'un franc sourire aux lèvres, sans aucun mépris,

Me prouve que tu es, encore un peu épris.

 

Occulter de ma vie tout ce qui m'est passion,

Refuser sur ce point la moindre concession

Me fait parfois douter de notre engagement.

L'égoïsme tu sais, mène à l'isolement !

 

Puisqu'il est avéré qu'on n'est que de passage,

Crois-tu que se gâcher soit à ce point bien sage ?

On ignore le temps qui nous est imparti,

Evitons les regrets quand l'un sera parti !

 

Rappelle-toi… Ces rêves et ces idées loufoques

Sont les mêmes que ceux, des premières époques

Qui ont su te séduire et qui t'ont fait m'élire,

Et te faire dire "oui" au meilleur comme au pire.

 

Cynthia comprenait  mieux pourquoi sa mamie évitait de parler de sa passion, qu'elle avait en quelque sorte du vivre comme une névrose, une tare ou une marginalité, rejetée par son entourage.

Par contre, qu'elle lui ait caché à elle, sa petite fille, une littéraire, lui serrait le cœur.

 

Il lui apparaissait comme un devoir de mettre aujourd'hui ces écrits en pleine lumière, d'autant plus que sa mamie avait , à son avis, une bien jolie plume.

Elle entreprit donc, les jours qui suivirent, de dactylographier quelques poèmes qu'elle envoya à quelques éditeurs, tout en se promettant qu'elle aurait toujours la possibilité de payer une auto-publication de ce recueil avec une petite partie du produit de la vente de la maison de la défunte, dont elle était la seule héritière.

Elle pouvait bien faire ça en mémoire de sa grand-mère !

 

Elle n'eut pas à le faire, puisque à sa grande surprise et immense joie, l'un d'eux accepta d'en faire, certes un faible tirage, mais la poésie est une catégorie littéraire assez peu demandée, aussi était-ce encourageant.

 

Forte de ce succès, Cynthia se mit à retranscrire sur l'ordinateur un roman qui l'avait beaucoup émue : "Femme d'un seul homme" qui racontait la quête d'une femme pour savoir la vérité sur son amour de jeunesse déçu, et le confia également au comité de lecture de différents éditeurs.

 

Les intentions de la jeune fille n'étaient en aucun cas de tirer profit des écrits de son aïeule, mais il lui tenait à cœur de réaliser post-mortem son vœu de laisser une trace :

 

Ecrire pour vivre encore,

Pour défier la mort,

Pour être toujours là

Bien que dans l'au-delà.

 

Ecrire pour te parler,

Te guider et t'aimer,

Laisser auprès de toi

Un petit peu de moi.

 

Ecrire pour que jamais

Tu ne puisses oublier

Que tu es tout pour moi

Tout et même au-delà.

 

Elle se sentait comme investie d'une mission.

C'est dire à quel point elle accueillit avec un immense enthousiasme l'offre des Editions des Frais Fonds, de publier ce roman.

 

Elle choisit avec soin la photo qui figurerait au dos de la couverture et rédigea la fiche d'identité de Marcelle Valdes.

 

-          "Ma petite mamie, tu n'es plus une "écriveuse", tu fais désormais partie de la grande famille des écrivains" murmura-t-elle les larmes aux yeux.

 

 

Les semaines qui suivirent Cynthia décida de faire une pause. Elle s'était donnée tellement à fond à cette "mission" depuis plusieurs mois, qu'elle se sentait vidée. Plonger ainsi dans les écrits de sa grand-mère lui avait empêché de faire son deuil, et psychologiquement, cela commençait à la fragiliser.

 

Elle décida donc de refermer quelques temps le couvercle du coffre d'osier et de se concentrer sur son métier de professeur, et  sur ses élèves, de sortir avec des amis, bref, vivre enfin SA vie.


 

Un dimanche après-midi, alors qu'elle corrigeait quelques copies, lovée sur son clic-clac face à la télé, on sonna à la porte.

 

-          "Monsieur ?

-          Bonjour Mademoiselle, je suis Lucien, enfin… le Régis de  "Femme d'un seul homme" lui dit-il en présentant le livre de Marcelle. C'est l'éditeur qui m'a dit… Il m'a communiqué votre adresse…

-          Comment ça ? Mais… ce n'est qu'un roman…

-          Oui, toute la seconde partie du livre, mais la rencontre, cette passion qui unit les personnages… c'est Elle et moi ! Tout ça c'est notre histoire, jusqu'à ce que l'on nous sépare."

 

Ce qui frappait le plus pour un garçon de cet âge, c'était cette façon de se tenir droit comme un i, c'était cette assurance qu'il avait et surtout, cette façon qu'avaient ses yeux de changer de nuances entre l'ocre et le vert…

 

Bien sûr que Cynthia avait devant elle aujourd'hui un vieux monsieur, mais en se remémorant cette phrase écrite de la main de sa grand-mère, elle avait la preuve au premier coup d'œil, qu'il s'agissait du même homme. Elle l'invita donc à entrer.

 

Et Lucien de raconter comment la mère de Marcelle lui avait intimé l'ordre de laisser sa fille tranquille, pour de fausses mauvaises raisons…

 

-          "En ce temps-là, Mademoiselle, on ne discutait pas vous savez. J'ai pourtant essayé d'insister, mais voyez, toutes mes lettres m'ont été retournées."

 

Il sortit en effet de sa poche tout un paquet de veilles enveloppes entourées d'un élastique, avec la mention "RETOUR A L'EXPEDITEUR".

 

-          "Je l'ai toujours aimée vous savez… D'ailleurs je ne me suis jamais marié… Alors quand j'ai vu sa photo sur le livre à la FNAC, je l'ai tout de suite reconnue… Le temps ne change pas l'intensité du regard Mademoiselle, et le sien était inoubliable…"

 

L'homme essuya une larme et Cynthia envahie par l'émotion, alla chercher un petit carnet dans le coffre en osier.

 

-          "Tenez, je crois que ces poèmes vous étaient destinés".

 

Il ne dit rien, prit le précieux cadeau sans l'ouvrir et le glissa dans la poche intérieure de sa veste, là où battait son cœur.

 

-          "Puis-je encore vous demander une faveur Mademoiselle ?"

-          Dîtes toujours…

-          Pourriez-vous me conduire auprès d'elle… je pourrai alors, enfin lui dire au revoir…"

 

Face à la tombe de granit gris, la jeune femme comprit que désormais, elle avait définitivement rempli sa mission en regardant Lucien déposer une rose à côté de l'extrait du poème que Cynthia avait fait graver sur une plaque :

 

Ecrire pour que jamais

Tu ne puisses oublier

Que tu es tout pour moi

Tout et même au-delà.



Claudie Becques (2006)

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17 décembre 2008 3 17 /12 /décembre /2008 09:00





Le Père Noël est assis face à son ordinateur où il enregistre toutes les commandes des enfants.

Il entre ainsi toutes les données – noms, prénoms, adresses et vœux – qui figurent dans les lettres qu'il reçoit et qu'il peut ensuite passer dans le destructeur de documents, pour les recycler en poussières d'étoiles qui formeront les queues des comètes.

 

Via intranet, il transmet alors aux lutins magasiniers l'ordre de faire emballer les cadeaux demandés qui ont été fabriqués au cours de l'année. Ces derniers sont ensuite envoyés par tapis roulant au service expédition qui peut alors charger le traîneau magique.

 

Le fait d'être très âgé ne l'empêche pas d'être à la pointe du progrès !

 

Outre un gain de temps très appréciable, l'informatisation du Père Noël lui offre en plus, la possibilité de consulter d'un simple clic le suivi des commandes, le prix de revient de chaque tournée et d'ainsi pouvoir établir des statistiques.

Tout est donc répertorié, enregistré, sauvegardé et archivé, année après année.

 

Il peut aussi par ce biais, en tant que chef de la plus grande entreprise du monde, rendre compte au fisc des cieux et à l'URSSAF. Eh oui ! On ne fait pas travailler autant de lutins sans verser de cotisations !

Très soucieux d'être bien en règle avec l'administration céleste et surtout en totale conformité avec les normes terrestres le Père Noël préfère donc s'acquitter personnellement de ces tâches.

 

Lorsque tout à coup : "ALERTE ! ALERTE ! DETECTION D'UN VIRUS ! ALERTE ! ALERTE !"

 

Le vieux barbu n'avait encore jamais jusqu'à ce jour, été confronté à ce problème.

Son écran devint noir, puis le tableau sur lequel il travaillait réapparut, mais un énorme ver se mit à dévorer ligne après ligne chacune des données qu'il venait d'y intégrer.

 

Le Père Noël bipa immédiatement le lutin ingénieur-informaticien qui accourut aussitôt.

 

-         "Utilise vite une disquette antibiotique, s'impatienta, le vieil homme en s'épongeant le front avec son grand mouchoir à carreaux

-         Voyons Père Noël, vous savez bien que ce n'est pas automatique, et en plus ça sert à rien" gronda le spécialiste en insérant un CD ROM dans l'unité centrale."

 

Le moteur ronronna et comme par magie, le ver cessa de dévorer les éléments du tableau.

Le lutin fit encore diverses manipulations sur le clavier qui désintégra définitivement le monstre.

 

-         "Ouf ! Mais pour les éléments manquants ?

-         Vous n'aviez pas fait de sauvegarde Père Noël ?

-         C'est que je n'en ai pas eu le temps" paniqua l'homme à l'habit rouge en se précipitant sur la corbeille de lettres destinées à la broyeuse."

 

Il recommença à saisir chaque demande dans son tableau.

 

Normalement l'incident n'aura pas été préjudiciable. Je dis bien "NORMALEMENT" !

Mais, si par hasard, votre souhait ne se réalisait pas lors de la nuit au 24 au 25 décembre, ne soyez pas trop sévère avec le Père Noël, et dites-vous que vous n'êtes que la victime d'un malencontreux bug informatique.

 

Claudie Becques  (12/12/2007)




Vous pouvez retrouver ce conte sur mon espace réservé aux petits : http://raconte-moi-polly.over-blog.com/

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13 décembre 2008 6 13 /12 /décembre /2008 08:41



    Le grand conte de Noël pour les petits et les grands



Chacun sait maintenant que malgré son âge avancé, le père Noël a su se mettre au goût du jour en s'informatisant.

 

Or, devant son écran d'ordinateur, il considère un état comparatif qui lui fait froncer les sourcils. Même en tenant compte des inflations successives, le coût de ce Noël dépasse déjà largement toutes les projections financières qu'il avait pu faire sur son PC portable, cet été sur le sable chaud des îles tropicales.

 

-         " Et nous ne sommes que le 15 décembre, soupire-t-il, voyons, voyons… un ordinateur, une Playstation, un lecteur DVD, un VTT, une voiture électrique…."

 

Le père Noël  parcourt l'immense liste et constate, effondré, que pas un enfant n'ait fait un vœu simple, ni ait eu une pensée pour autrui. Il est subitement prit, d'une violente colère :

 

-         " Ah non ! Mais cela ne correspond pas du tout à l'esprit de Noël. Donnez-moi… Apportez-moi…. J'ai été sage…. J'ai eu un bon classement… J'ai mérité… Je… Je…. Je… Cette fois c'en  est trop ! Les enfants d'aujourd'hui sont beaucoup égoïstes. Je ne ferai pas la distribution !"

 

Il rédige immédiatement un mail à l'attention de tout le personnel :

"Veuillez suspendre immédiatement la préparation des cadeaux : je dépose un préavis de grève pour la nuit du 24 au 25 décembre. Le Père Noël."

 

Le porte-parole des lutins demande aussitôt audience :

 

-         " Mais père Noël, depuis la nuit des temps, on n'a jamais vu çà  un Noël sans distribution !

-         Peut-être, mais moi je n'ai jamais vu autant d'égocentrisme. Regardez cet écran, c'est à celui qui demande le cadeau le plus cher ! Pas un ne pense à son semblable. Les enfants ne sont plus ce qu'ils étaient, et ils ne méritent pas que l'on cède ainsi à toutes leurs exigences. Tout le monde a oublié les vraies valeurs de cette fête. Il est temps que je réagisse en boycottant la réalisation de leurs souhaits. Je ne sais d'ailleurs pas ce qui me retient de transmettre leurs coordonnées au père Fouettard.

-         Vous ne le pensez-même pas, sourit le lutin

-         Ah, ne me défiez pas, tempêta l'homme en rouge en prenant sa lorgnette magique qu'il dirigea vers la terre, regardez-moi cette bande de chenapans qui se bagarrent à la sortie des écoles, et celui-ci qui vole des CD dans le magasin, quant à cet autre qui met le feu à la poubelle…

-         Mais père Noël, vous tenez votre lorgnette du mauvais côté, c'est pour çà que vous ne voyez que les choses négatives, retournez-là…

-         Taratata… Je vais aller faire incognito ma petite enquête et voir si les enfants ont encore une âme saine. Je mets tout le personnel est en RTT aujourd'hui, le temps que je descende sur terre pour vérifier. Si je n'ai pas trouvé cinq enfants qui aient une intention positive à l'égard du vieillard que je suis, avant la tombée de la nuit, je maintiendrais ma grève. Dans le cas contraire, mais j'en doute, je reviendrai sur ma décision…"

 

Et le voilà déguisé en papi-tout-le-monde avec dans ses poches magiques, quelques accessoires qui lui permettront de tester le cœur des petits terriens.

 

 

 

Le père Noël (Chut ! C'est un secret) s'installe sur un banc et observe durant quelques instants des gamins qui s'exercent au skate board. Puis il se relève péniblement en soulevant le sac qui était à ses pieds. Une anse cède sous le poids des provisions qui s'en vont rouler de part et d'autre.

Quelques rires fusent tandis qu'il essaie péniblement de  rassembler ses achats, lorsque :

 

-         " Attendez M'sieur, on va vous aider… on va poser votre sac sur le banc et on va tout remettre dedans… Eh, les gars au lieu de vous marrer, venez donner un coup de main…"

Et en deux temps trois mouvements, les gosses déposèrent le cabas rempli dans les bras de notre vieillard :

 

-         " Merci les p'tits gars… Z'êtes sympas…" les remercie-t-il en n'accordant toutefois qu'un seul point au petit blondinet qui s'était avancé vers lui le premier.

 

Et d'un !

 

 

Le voilà qui s'installe ensuite tout près d'une briocherie dans une rue commerciale avec une pancarte "J'ai faim. Aidez-moi s.v.p. Merci !" et attend tel un vrai clochard.

 

Quelques clients se succèdent jusqu'au passage de cette maman et de sa petite fille :

 

-         "Veux-tu un petit pain au chocolat ma Chérie ?

-         Non merci, je n'ai pas faim… mais est-ce que tu peux quand même en acheter un s'il te plaît … pour le donner au monsieur," répond-elle en montrant le SDF

 

La maman surprise, hésite quelques secondes, puis accepte :

-         "Donne lui toi-même puisque c'est ton idée

-         Tiens monsieur… Tu sais tu ressembles au père noël avec ta barbe…

-         Il se peut que je le connais très bien… Comment t'appelles-tu ?

-         Suzy

-         Je lui parlerai de toi si tu veux, je lui dirai que tu as un cœur gros comme çà… Tu veux quoi pour Noël ?

-         Un petit frère, et un karaoké…

-         Pour le petit frère je ne sais pas s'il pourra, mais pour le reste il sera sûrement ok !" répond-il avec un clin d'œil tandis que la maman entraîne la gamine

 

Et de deux, pense t-il en se frottant les mains. Son moral commence à revenir !

 

Il sort ensuite une canne blanche de sa poche magique et avance ainsi en la tapotant devant lui sur le trottoir et en se tenant de l'autre main  au mur qu'il longe, jusqu'à arriver à un carrefour.

Un gosse qui l'observe avec curiosité le désigne du doigt à l'attention de l'homme qui se tient à côté de lui :

-         "Il voit pas clair le monsieur ? Et comment il va faire pour traverser ?

-         Ca va pas être facile pour lui… Tu sais quoi ? On va se mettre juste à côté de lui et tu lui diras quand le petit bonhomme va passer au vert

-         Ouais ! jubila l'enfant… Le petit bonhomme il est encore rouge monsieur, faut encore attendre… Là c'est vert, tu veux que je te donne la main pour pas te faire écraser ?

-         C'est très gentil çà, je veux bien…"

 

Et l'enfant glisse sa menotte dans la grosse main du vieil homme et le tire pour le faire traverser.

 

-         "Voilà Monsieur, on est arrivé…

-         Merci mon garçon… Je dirai au père noël que tu as été très mignon avec moi… Tu lui as demandé quoi ?

-         Des légos et pis une game-boy….

-         Je pense en tout cas que tu les mérites amplement ! N'oublie pas de mettre tes chaussons près du sapin…

-         Ouaich… D'accord ! Au revoir monsieur…

-         Au revoir mon gamin !"

 

Et de trois !

 

Le Père Noël commence à reprendre espoir quand ….

 

-         "Alors pépé, tu te pousses, tu devrais retourner dans ton asile

-         Ouais, t'as rien à faire là. Les vieux à l'hospice ! renchérit un rouquin en poussant le vieil homme

-         Vous n'avez pas honte, petits vauriens ? maugrée ce dernier         

-         Petits vauriens, minaude le premier en lui faisant un croche-pied, attention pépère, tu vas tomber… Ben voilà, t'es par terre !" En effet l'homme trébuche et tombe sur le trottoir. Le deuxième s'apprête à lui donner un coup de pied lorsqu'une sirène de police retentit et fait se carapater les deux adolescents.

 

Le père Noël se relève et s'ébroue en grommelant.

 

-         "T'as mal ? lui demande une petite voix

 

Il se retourne et ne voit personne jusqu'au moment où un petit bonhomme aux cheveux couleur carotte sort de derrière des poubelles rangées sur le trottoir d'en face.

 

-         "Qu'est ce que tu fais là ? demande l'homme

-         Je me cachais… Sinon ils m'auraient embêté aussi… C'est mon frère et son copain… Ils ont du boire des bières… Quand il a pas bu mon frère, il est pas méchant, mais quand il est comme çà, il sait plus ce qu'il fait…

-         La belle excuse ! Et ils en disent quoi tes parents ?

-         Mon père il s'est barré y a longtemps… J'ai pas connu… Et ma mère, elle s'en fout… Enfin j'sais pas… Elle dort tout le temps avec ses médicaments… Au début elle râlait… Maintenant elle dit plus rien…

-         Il fait quoi ton frère… à part boire ? Il ne va plus à l'école ?

-         Non, il a dix-sept ans… Il dit qu'il veut travailler mais qu'il sait pas quoi faire et puis y a pas d'boulot alors il "zone" avec des potes.

-         Et toi là-dedans ?

-         J'vais à l'école… Enfin des fois… J'aime pas trop çà, c'est chiant… Mais moi j'suis obligé à cause des "allocs" qu'elle dit ma mère… Mais j'comprends rien… C'est nul l'école.

-         Tu aimes quoi alors ?

-         Les chiens ! J'vais souvent à la SPA pour les soigner et les promener. Ils disent rien les chiens… Ils te regardent juste en remuant la queue… Mais moi je lis dans leur regard… Eux et moi, on se ressemble…

-         Tu en as un à toi ? demande le vieil homme, ému devant les yeux brillants de l'enfant

-         J'peux pas, on peut pas dans mon HLM… C'est pour çà que j'vais à la SPA

-         Si tu devais faire un vœu pour Noël, ce serait quoi ?

-         Rien, parce que Noël c'est des conneries et que quand on n'attend rien, au moins on n'est pas déçu… Ils sont où les keufs pour finir ? se rappelle t-il brusquement en scrutant la rue

-         Je ne sais pas mon garçon… Je ne sais pas… Tu devrais rentrer maintenant, ta mère va s'inquiéter…

-         Pffff ! Comme si ! Et toi çà va aller pour ton hospice ?

-         ???

-         Ben ouais, la maison des vieux !

-         Ah ! Oui… Merci… Ca ira… Rentre bien !

-         Salut !

-         Salut mon garçon. Prends soin de toi !"

 

Et le Père Noël de reprendre son chemin en soupirant de désespoir face à cette triste réalité, à laquelle sont confrontés certains petits bonshommes, qu'aucune magie, qu'aucun vœu, ne pourront jamais combler.

 

Il accorde donc un miséricordieux point au petit poil de carotte que l'enfance a abandonné dès le premier jour de sa naissance.

 

 

Il est encore perdu dans ses pensées quand ses pas l'emmènent dans un grand centre commercial jusqu'à un immense rayon de jouets et de consoles de jeux.

 

Deux garçonnets en observent  un autre qui teste le dernier modèle, la Nintendo Wii à 250 euros :

 

-         " Elle est vraiment trop top !

-         Oh, oui, trop top, répond l'autre, tu es sûr que c'est celle-là que tu vas avoir à Noël?

-         Oui, oui, mon père ma l'a promis, et il tient toujours ses promesses, et un portable aussi, un SAGEM qui prend des photos…

-         Et un portable aussi ! Purée t'en as de la chance ! Il est riche ton père ?

-         Je sais pas, mais quand je vais le voir il me paie tout ce que je veux

-         Waouh ! T'es vraiment un veinard !

-         Par ma mère, je vais avoir un ordinateur avec une webcam pour t'chatter sur MSN avec les copains de l'école"

 

L'autre ouvre de grands yeux :

 

-         " Et un ordinateur en plus !

-         Ben ouais ! Tu sais, depuis que mes parents sont divorcés, ils ne savent pas quoi faire que je sois content… Et toi, tu as demandé quoi pour Noël ?

-         Oh, moi tu sais, cette année, pas grand chose. Mon père vient de recevoir sa lettre de licenciement, tu sais la papeterie qui vient de fermer ? Il travaille là, alors, il m'a expliqué qu'en fait ce sont les parents qui donne des sous au Père Noël pour les cadeaux, alors il n'y aura pas de folie cette année parce qu'il a peur de rester un moment au chômage…

-         Zut ! C'est bête ce qui t'arrive !

-         Oui ! On va juste réveillonner chez mes grand-parents avec mes oncles et mes tantes. Ca sera sympa quand même parce que mes cousins seront là, et puis maman m'a dit que j'aurai quand même le dernier jeu X-Men  pour la Playstation que j'ai eue l'an passé.

-         Waouh ! T'as d'la veine !

-         Tu te fous de moi ?

-         Non, non … Tu sais… En fait les cadeaux je m'en fous un peu… Je préfèrerais faire comme toi une grande fête avec mon père et ma mère ensemble à la même table, et puis toute la famille… Tandis que là, je vais passer Noël avec ma mère et son copain, et la semaine du nouvel an j'irai chez mon père et ma belle-mère… Et c'est pas trop cool !

-         Ouais, t'as raison… C'est pas cool ! C'est pas facile hein de tout avoir ?

-         Non, pas facile… Eh, c'est à notre tour d'essayer la Wii !"

 

Le père Noël n'a pas perdu une seule parole de cet échange entre les deux garçons.

 

-         "Avec ces deux là, le compte est bon. J'en sais assez !"

 

Et d'un claquement de doigts le voilà de retour dans son monde magique.

 

-         "Alors père Noël, s'enquiert, anxieux, le porte-parole des lutins, croyez-vous de nouveau aux enfants ?

-         Oh, que oui ! Crois-moi, ils font ce qu'ils peuvent les pauvres petits… Mais tu sais ce qui me rend  triste ? C'est que je suis dans l'impossibilité de les combler tous, de rendre le sourire à certains… Ils se débattent dans un monde dur et sans pitié, et ma mission n'est pas de les juger mais juste de faire mon travail : livrer les cadeaux à ceux qui m'ont fait parvenir une lettre. Je ne suis que du rêve, mais eux, doivent affronter la réalité… Nous avons du travail mon bon lutin… Nous ne devons pas décevoir ceux qui espèrent encore en nous."



Claudie Becques 12/12/2007 

 
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18 juillet 2008 5 18 /07 /juillet /2008 22:00
Texte écrit pour la Petite Fabrique d'Ecriture dans le cadre de la consigne du 16 au 29 avril 2008 pour parler d'un vêtement ou de chaussures....





L'inébranlable amour que se sont toujours voués mes parents qui se sont connus à quatorze ans dans une salle de bal, a toujours été bercé par leur passion de la danse.
 

Aussi, lorsque je fus en âge de rester sagement assise sur une chaise, ils envisagèrent de reprendre cette activité en m'emmenant avec eux chaque dimanche après-midi, dans un café-dancing en Belgique à l'ambiance très familiale et dont l'âge moyen de ses habitués devait avoisiner la soixantaine.

 

Si j'ai suivi avec intérêt au début,  le mécanisme de cet orchestre-automate qui fonctionnait à l'aide de cartes perforées, je dois dire qu'au bout de quelques mois, je commençai à me lasser, en sirotant mon soda.

 

Fort heureusement, d'autres familles semblables à la mienne  y vinrent également, ce qui me permit de me lier d'amitié avec quelques filles de mon âge, avec lesquelles je pus moi aussi danser.

Les années passèrent ainsi, stupéfiantes de monotonie et d'habitudes jusqu'à l'aube de mes quinze ans, où il est entré dans le dancing.

 

Je ne pus détacher mon regard de la silhouette altière de ce garçon, qui s'en aperçut et me gratifia d'un sourire… à tomber par terre.

 

Si je gardais un calme apparent, assise sur mon siège, un tumulte intérieur faisait voler en tous sens tous les a-priori que j'avais à l'époque pour la gente masculine de ma génération, et je n'avais plus qu'une seule envie : qu'il m'invite.

Ce qu'il fit, après quelques minutes qui me parurent des heures,  et je me jetai littéralement dans ses bras, sous l'œil protecteur de mon papa, qui n'avait pas manqué d'observer mon trouble.

La chose ne s'atténua pas loin de là, puisqu'il dansait comme un Dieu et je priais silencieusement pour que la musique ne n'arrêtât pas.

Ce fut pourtant le cas mais il ne me lâcha pas pour autant et nous enchaînâmes  tangos, valses, salsas et slows tout en échangeant quelques présentations d'usage, jusqu'à se laisser aller à quelques confidences.

C'est ainsi que j'appris que bien que paraissant beaucoup plus que son âge, il n'était en fait que d'un an mon aîné, et qu'il avait une admiration sans borne pour la chanteuse Joëlle du groupe mythique de l'époque "Il était une fois", parce qu'elle était blonde, jolie, fine avec de longues jambes.

 

Inutile de vous dire que s'opéra immédiatement dans ma tête une comparaison entre elle et moi.

Pour les cheveux longs et blonds, pas de problème, et le temps n'ayant pas encore fait son œuvre ma taille n'avait alors, rien à envier à celle de l'artiste.

Pour ce qui était des longues jambes je mesurais très vite l'étendue de mon problème avec mon mètre soixante, que je déplorais d'autant plus que lui, devait bien avoir vingt-cinq centimètres de plus que moi.

 

Le temps passa très vite et, désappointée  je dus me résoudre  à suivre mes parents pour un retour à la maison non sans un dernier slow durant lequel il  promit de revenir la semaine suivante, et me dit cette phrase mémorable  : "dommage que tu sois si petite, parce que je t'aurai bien volontiers pris la bouche avant de te quitter".

 

Il avait du entendre cette réplique dans un film en se jurant de la recaser à l'occasion, c'était fait et moi j'avoue avoir à cet instant, maudit la nature qui m'avait ainsi dotée de si courtes pattes et me privait du baiser de mon prince.

 

 

Les sept jours qui suivirent furent à la fois interminables et rapides.

Mon journal "Podium" entre les mains, je passai mon temps à chercher le moyen de ressembler le plus possible à l'icône de mon bien-aimé.

Je tannai donc maman de me confectionner un jean blanc à pattes d'éléphant, très branché à l'époque, ainsi qu'un chemisier ultra-cintré pour mettre en valeur la finesse de ma taille, ce qu'elle fit de bonne grâce, consciente que sa fille, amoureuse, souhaitait renouveler sa garde-robe.

 

Je l'entraînais finalement chez le marchand de chaussures où elle me fit cette immense joie que d'accepter l'achat d'une paire de nu-pieds  à semelles compensées, le summum de la mode de cet été-là : cinq centimètres de semelle et quinze de talon.

 

Le week-end arriva finalement… et lui aussi !

 

Je me souviendrai longtemps du point d'interrogation dans ses yeux lorsque je fus dans ses bras et que je logeai naturellement ma tête dans le creux de son cou pour m'enivrer de son eau de toilette.

 

Il ne posa pas de question, et blottis l'un contre l'autre, nous ondulâmes longtemps au son du crin-crin de l'accordéon mécanique jusqu'à ce que, hors du champs de vision de mes parents il déposa  sur mes lèvres ce baiser qui devait déchaîner au creux de mes reins un courant électrique jamais encore ressenti et que je n'ai jamais pu oublier.

 

Notre idylle dura le temps que les enfants sont capables de croire aux contes de fées, mais je dois avouer que certaines nuits...

j'ai encore rêvé d'elle…

 

 

Claudie Becques

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22 juin 2008 7 22 /06 /juin /2008 12:03

chat1.jpg

Il était une fois un vieil homme solitaire, qui déposait chaque jour sur le seuil de sa maison, un petit bol de lait pour les chats de passage.

Sa porte restait constamment entrouverte pour ceux qui auraient envie de faire une pause durant quelques jours.
Beaucoup s’y arrêtaient, puis repartaient.
Sauf Mimine, une jolie petite chatte blanche tachetée de gris, qui trouva l’endroit si agréable qu’elle décida d’élire domicile chez Emile.
Le lait y était frais et la pâtée goûteuse.
L’homme était calme et lui parlait d’une voix tendre, quand il s’asseyait le soir dans le fauteuil face à la cheminée en la prenant sur ses genoux.
Mimine ronronnait alors de plaisir, tandis que les grosses mains rugueuses la caressaient avec une extrême douceur. Tous deux passaient ainsi de longues soirées à regarder la folle danse des flammes dans l’âtre.
Quand à une heure avancée de la nuit, le feu s’était éteint, le maître allait se coucher et la chatte s’endormait au bout de son lit.

De temps en temps Emile recevait la visite de ses trois fils.
Mimine n’aimait pas ces hommes.
Elle ne comprenait pas le langage humain, mais l’intonation de leurs voix lui déplaisait fortement.
Néanmoins, comme les entrevues étaient de courte durée et que cela ne la regardait pas, la chatte se contentait d’observer la scène du coin de l’œil sous une apparente somnolence, vautrée dans le petit panier qu’Emile lui avait aménagé.

Un matin, Emile ne se leva pas. Elle trouva qu’il était plus froid que d’habitude, et tenta de le réchauffer en se couchant sur lui.
Mimine ne savait combien il y avait eu de levers et de couchers de soleil avant que ne retentisse la sonnette de la porte d’entrée.
Elle savait seulement que son estomac réclamait à grands cris un bol de lait frais.

Emile n’ouvrit pas la porte et le visiteur s’en alla. Mais quelques minutes plus tard, une clef tourna dans la serrure et Mimine vit entrer les trois fils dans la maison.
Ils s’approchèrent du lit où reposait leur père tout en parlant à voix basse, comme s’ils craignaient de le réveiller. Ils prirent ensuite les deux chandeliers posés sur la poutre de la cheminée, allumèrent les bougies et les placèrent de chaque côté du lit.

Puis ils commencèrent à ouvrir toutes les portes des armoires qu’ils fouillèrent de fond en combles, et à rassembler quelques objets sur la grande table. L’un d’eux y déposa également une grosse boîte de fer blanc qu’il avait trouvée. Il l’ouvrit, feuilleta les liasses d’un drôle de papier, et une discussion très animée s’éleva alors entre les hommes.

Toujours couchée sur Emile, la chatte s’impatienta et jugea qu’il était maintenant temps de leur rappeler sa présence et les repas manqués par un miaulement.

Tous trois se retournèrent en même temps et s’avancèrent vers elle. L’animal eut soudain la sensation d’un danger imminent et un drôle de courant électrique lui parcourut les flancs. C’était un sentiment étrange et encore jamais perçu, qui l’envahit.

Le premier homme la saisit par la queue et instantanément Mimine planta ses petites dents acérées dans la main qui l’enserrait.
Le second tenta de l’empoigner par le collet, mais rapide comme l’éclair elle lui balafra la joue de ses griffes qui sortaient pour la première fois de sa vie.
Avant même que le troisième homme ne fit un seul geste en sa direction elle lui sauta au visage en lui crevant les yeux.
Les trois fils se ruèrent alors hors de la maison en hurlant, tandis qu’emportée dans sa folie meurtrière, le poil hérissé, la chatte se jeta sur les meubles, les murs et les rideaux qui s’enflammèrent aux candélabres.

La danse folle du feu qui commençait à envahir la pièce calma immédiatement Mimine qui se coucha sur Emile en ronronnant.
Tout irait bien maintenant, le maître allait se réchauffer.
Bientôt sa grosse main rugueuse lui gratouillerait le cou.

Moralité :
Il est en chaque petit animal doux et fragile, un instinct sauvage qui somnole.
Prenez bien garde à ne pas le réveiller
.

Claudie Becques

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16 mai 2008 5 16 /05 /mai /2008 05:11

pitchounette_web.jpg

- 1 - Pitchounette


Je ne la connaissais que de nom. Mais les rares fois où il apparaissait dans les conversations, les adjectifs "excentrique" ou "originale" la qualifiaient immanquablement.

Je savais d’elle qu’elle avait vécu plusieurs années en Algérie où elle avait suivi un homme, qu’elle était mère célibataire, habitait en banlieue parisienne et exerçait la profession de relieur.

De nos jours, cela passerait pour être d’une banalité navrante, mais au début des années 60, pour une famille ouvrière ch’timi, où le mot d’ordre de mon père, était "ne pas se faire remarquer", et "ne pas entrer dans la langue des gens", tante Odette, faisait un petit peu "tâche" dans notre univers de transparence.

-"Dis papa, c’est quoi ec-san-crite ?" Il brandissait alors au-dessus de sa tête, la main pour la faire danser telle une marionnette, en prenant garde que maman ne le voit pas.

Je m’attendais donc à ce que la sœur de ma grand-mère maternelle, soit une espèce de "foldingue".

A l’aube de mes 5 ou 6 ans, la première fois que je l’ai vue, sortant de sa 4L, j’ai su qu’une femme de cette classe là, serait à tout jamais mon idole.

Elle était assez grande et bien bâtie, habillée d’un tailleur style Chanel, dans des nuances de beige et de marron clair, sac à main et escarpins assortis, collier de perles fines et lunettes au bout d’une chaînette d’or, posés sur la poitrine, les cheveux permanentés et brushés à la Margaret Tatcher.

Elle avait ce rire cristallin et moqueur de ces gens insouciants, épris de liberté, et ce petit nom de "pitchounette" qu’elle me donna avec un gros baiser sonore, résonne encore dans ma mémoire.

dauphine.jpg

 - 2- Morangis -

 Après quelques années de patience et de tergiversations, papa céda.

Nous nous entassâmes à cinq dans la Dauphine, direction Morangis.
Aux copines, j’avais préféré dire que j’allais à Paris : çà faisait mieux.
De toute façon, ce n’était pas un vrai mensonge, puisque heureuse de nous recevoir enfin, tante Odette s’improvisa guide, et nous fit découvrir fièrement, tous les monuments de la capitale, que nous ne connaissions qu’en photos.

Cette petite excursion fut décisive pour mon frère, alors adolescent : il serait Parisien !
La vie lui a d’ailleurs donné raison.

J’étais personnellement davantage séduite, par le petit pavillon banlieusard, prolongé par un atelier de reliure (dont on m’avait interdit l’accès)le tout s’ouvrant sur un magnifique jardinet et une pelouse.

Peu habitué au va et vient d’une gamine d’une douzaine d’années, le cerbère de ces lieux, Sherekhan, un jeune berger allemand, agacé par le bâton que je tenais à la main, fut pris d’une pulsion sauvage, et me sauta à la gorge.

Je ne dus mon salut qu’au fils de tantine, que je n’avais encore jamais rencontré, et qui, alerté par les grognements rageurs, vint me délivrer des crocs du monstre, tel le prince charmant de mes livres de contes.
Il était grand et mince. Sa peau blanche contrastait avec ses cheveux et son collier noirs de jais. Il était élégant et racé comme sa mère.

Michel était alors marié à une violoniste du Conservatoire de Paris.
Je garde un souvenir mémorable du spectacle auquel nous assistâmes après le dîner :
les doigts de ma tante, couraient avec légèreté sur le clavier du piano à queue qui trônait dans le séjour, pour accompagner sa bru, sur un morceau de musique classique qui me fit basculer dans une dimension auditive, dont j’ignorais tout.

Jusqu’alors essentiellement bercée par le son nasillard du piano à bretelles où de l’harmonica de papa, ce séjour chez mon aïeule m’avait ouvert les yeux et les oreilles sur des horizons nouveaux qu’il me tardait d’approfondir.

A notre retour dans le Pas de calais, je m’inscrivis à l’école de musique communale.

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- 3 - Moyrazes -

 La mode des vacances “utiles” et “créatives” s’abattit sur la France.

Tante Odette, toujours en avance sur son temps, avait pressenti l’événement et était partie s’installer dans un minuscule village de l’Aveyron, à une dizaine de kilomètres de Rodez.

Elle avait acheté une grande maison de pierres, située dans le creux d’une vallée, à proximité de la rivière.

Cette demeure très typique avait la particularité d’être paradisiaque l’été pour les amoureux de la nature et de la pêche à la truite, mais totalement inaccessible l’hiver.

Les gens du pays eurent tôt fait de la prendre, eux aussi, pour une excentrique.

Que penser d’autre d’une femme d’une cinquantaine d’années, capable de vivre seule avec son chien, terrée chez elle toute la mauvaise saison.

Le fermier, propriétaire du château qui surplombait la vallée, palliait aux urgences, en lui déposant ce qu’elle lui avait demandé par téléphone, sans qu’il ose toutefois descendre de son tracteur, craignant à raison Sherekhan, que cette vie de reclus ne favorisait pas à rendre plus sociable.

Tous semblaient néanmoins aimer et respecter cette marginale qui dispensait ses cours de reliure d’art de juin à septembre et favorisait la “transhumance” de médecins, cadres et chefs d’entreprise de la Capitale et autres grandes villes, jusque chez eux.

Elle contribua ainsi à relancer pendant ces quelques semaines, l’économie commerciale, hôtelière, gastronomique et touristique du Rouergue.

Afin de divertir “ses élèves”, elle organisait des expositions, concerts, soirées feux de camps et folkloriques qui amenaient des quatre coins de France et même du monde, des artistes peintres ou musiciens, des archéologues, collectionneurs... dans leur région jusqu’alors si tranquille... trop tranquille.

Tante Odette devint une sommité régionale.

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- 4 - La Sauvagère

 Quelques images de son petit “paradis”, me reviennent souvent depuis ces merveilleuses vacances.

Ma tante avait voulu conserver le caractère très rustique de la pièce principale : murs et cheminée en pierres brutes, avec un énorme chaudron en fonte noir, une gigantesque table et ses deux bancs en bois massif, un buffet assorti, gorgé de confitures et conserves naturelles en tout genre, et dans le fond de ce séjour-cuisine, un saloir où pendaient une multitude de jambons et saucissons de pays.

La pièce d’à côté avait ma préférence pour sa décoration plus chaude. Sur les murs crépis étaient accrochés de magnifiques peintures d’impressionnistes, que j’avais plaisir à contempler. Des fauteuils en tissu confortables, étaient installés face à une autre cheminée plus stylée. Le piano qui me fascinait toujours autant y trouvait naturellement sa place, et, sur le côté, un grand escalier conduisait mes pas jusqu’à la magnifique et immense bibliothèque en mezzanine.

J’y serais restée des heures entières. Elle devait contenir à elle seule, le double des livres que celle que ma commune mettait à la disposition de tous ses habitants.
Une délicieuse odeur de cuir et de papiers anciens emplissait mes narines.
J’effleurais les livres sans oser en déranger un.**

Tante Odette avait remarqué mon émotion face à toutes ces richesses culturelles.
Elle sortait un bouquin de sa rangée avec d’infinies précautions, le qualifiait d’un superlatif, tournait une page ou deux pour en choisir un passage qu’elle me lisait à haute voix.
Elle le replaçait et renouvelait ainsi plusieurs fois l’opération.
Je crois bien qu’elle les connaissait tous par cœur. Il lui arrivait même de m’en dire quelques lignes, où d’en réciter une poésie, rien qu’en le pointant du doigt.

Elle m’en glissait finalement un entre les mains, que je dévorais le soir même, dans la petite chambre mansardée qu’elle m’avait attribuée.
Son choix était à chaque fois judicieux et comblait mes attentes.
Je lui exprimais le lendemain matin, les sensations que m’avait procurées l’œuvre conseillée.

Elle jugea alors que j’étais apte à pénétrer dans son atelier de reliure.

 ** voir le texte "les murmures de la forêt"

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- 5 - Une histoire d’Amour

 J’ai compris au fur et à mesure de ses explications, que la reliure d’art n’était pas qu’un simple métier.

C’était avant tout une histoire d’amour entre l’homme et le livre.

Pour obtenir un travail parfait (le bien fait n’aurait pas été suffisant) il fallait une infinie patience, de l’élégance dans les détails et du goût pour les proportions.

Chaque étape, chaque geste, chaque moment déterminaient la qualité finale du résultat.

La première opération consistait à vérifier l’état du livre, le collationner, le nettoyer, le débrocher. Choisir avec soin le fil de lin selon l’épaisseur et le type de papier des cahiers, afin de préparer le cousoir.

Le choix de la nature et de la couleur du cuir et celui du papier de recouvrement, devait refléter le caractère du livre.

Rien ne devait être laissé au hasard. Aucun empressement n’aurait été tolérable. Du respect des temps de séchage et de mise sous presse dépendait la réussite de l’ouvrage.

C’était à la fois, un travail de restauration, de chirurgie, de couture, de création.

Jusqu’alors j’aimais lire.
A partir de celui où j’ai accouché de ma reliure, j’ai aimé les livres.

Tante Odette, paraissait très satisfaite de sa jeune stagiaire, et déplorait que la distance m’empêchât de poursuivre dans cette voie pour laquelle j’avais d’indéniables dispositions.

Comme tout était toujours simple avec elle, elle expliqua à mon père comment me fabriquer un cousoir, une cisaille et une presse et promit de m’envoyer, dès que j’aurais été en possession de ces outils, les quelques instruments et matériaux indispensables pour me permettre de relier chez moi.

Papa acquiesça et prit des notes qu’il glissa dans sa poche pour lui faire plaisir, pour me faire plaisir.

J’y ai cru quelques heures, le temps du retour jusqu’à la maison.

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- 6 - (Fin) L’écriture en héritage

 Je ne sais comment ils ont fait pour braver Sherekhan, mais un jour on retrouva Tante Odette sur le plancher de sa chambre. Elle avait été victime d’une congestion cérébrale, qui lui paralysa la main droite et lui diminua considérablement la vue.

Son fils constatant les irrémédiables séquelles malgré de longs mois de rééducation, dut se résoudre à vendre La Sauvagère et laisser sa mère dans un foyer pour personnes handicapées.

Six ans s’étaient écoulés depuis mes “vacances insolites”**.
Elle déclina l’invitation à mon mariage pour des raisons de santé évidentes. De toute façon je n’aurais pas supporté de voir cette femme pleine de vitalité, diminuée... et pourtant !

Certes si elle ne pouvait plus se déplacer, son cerveau intact, persistait à bouillonner d’idées. Elle continua à œuvrer activement pour différentes associations notamment pour le MRAP (association anti-raciale).
Elle orchestrait par téléphone ses rendez-vous dans la chambre de son Foyer, prenant comme secrétaires les aide-soignantes qui se prêtaient à son jeu.

Le reste du temps, elle écoutait de la musique et elle écrivait, faute de n’avoir plus l’acuité visuelle nécessaire pour lire.
Maman qui savait mon penchant pour la rédaction de quelques poèmes, lui en fit part, et me transmit sa demande de lui en faire parvenir. Ce que je fis.
Elle me téléphona aussitôt pour me dire son enthousiasme, si heureuse de voir, qu’il y avait au moins une personne “normale” dans cette famille.

Toujours très convaincue que le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt, elle m’appela dès lors, systématiquement tous les dimanches matins, à 8 heures précises, sans que je ne puisse l’en faire changer, pour débattre sur certains textes ou faits d’actualité.

Afin de préserver mon équilibre conjugal je dus me résoudre à débrancher le téléphone, et de n’avoir de ses nouvelles que par l’intermédiaire de ma mère.

Je n’ai donc plus jamais eu l’occasion d’entendre le son de sa voix rieuse.

La vie m’emportant dans son grand tourbillon, j’ai durant de longues années cessé d’écrire.

J’ai appris il y a quatre ans, que tante Odette s’en était allée rejoindre les poètes qu’elle affectionnait.

Depuis ce jour là, je ne peux expliquer les raisons qui me poussent à reprendre la plume.

A moins que... 
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 Claudie Becques

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19 avril 2008 6 19 /04 /avril /2008 15:40
Texte écrit pour la Petite Fabrique d'Ecriture, dans le cadre de la consigne du 16 au 29 Avril, pour parler d'un vêtement porté, adoré, puis détesté...




In the town where I was born…
Oh, my god… mon Dieu !
Voilà ce que c’est que de remonter dans le temps de plus de trente années.
Comment vais-je maintenant libérer mon esprit de cette chanson qui m’obsède, comme ce matin là ?

"We all live in our yellow submarine,
Yellow submarine, yellow submarine…"

Dans la ville, donc disais-je, ou plutôt le département du Pas de calais où je suis née, l’année scolaire de 3ème se clôturait immanquablement –après le passage du brevet- par une excursion d’une journée à Londres, via le bateau.

Bien sûr il fallait au préalable fournir l’accord parental écrit ainsi qu’une participation financière pour payer le bateau, l’autocar étant gracieusement pris en charge par la commune.

Je crois bien n’avoir vécu ces quatre années de collège que pour ce fameux voyage au pays des Beatles : Big Ben, Picadilly Circus, Trafalgar Square, Buckingham Palace, Westminster Abbaye, St-James’S Park…
Que n’ai-je tant de fois fait ce trajet en rêve !

Maman, intraitable avait exigé que je sois dans les cinq premières de la classe (Eh oui, nous étions encore classées à cette époque !).
Je n’étais pas mauvaise élève, mais un petit peloton de tête de 5 à 6 camarades me distançait toujours de quelques dixièmes de points.
Mais l’enjeu était tel que je ne comptai pas, lors de ce dernier trimestre, le temps passé sur mes leçons et mes devoirs pour relever le défi et obtenir ainsi la signature maternelle. "Quand on veut, on peut, disait-elle". Elle avait raison, puisque à force de courage et de ténacité, j’ai pu décrocher la cinquième place et donc l’autorisation et le chèque pour aller à Londres.
 
J’étais tellement heureuse que je n’avais pu fermer l’œil de la nuit et c’est bien avant la sonnerie du réveil que je me levai, impatiente d’aller annoncer la bonne nouvelle aux copines et remettre les précieux documents au professeur principal.

Tandis que je faisais l’inventaire de mes vêtements les plus "branchés" à porter lors de ce voyage, mon pantalon jaune aux motifs écossais, gris et bleu marine me parut le plus indiqué pour ce périple britannique.

Il était dans le panier de linge propre que maman devait repasser lorsque je serai en classe, mais comme j’étais matinale, pourquoi ne pas le faire moi-même et soulager ainsi ma mère de cette tâche ardue ?

En ce temps-là, nous ne disposions pas de table à repasser.
Nous installions une épaisse couverture pliée en deux et doublée d’un vieux morceau de drap sur la table de cuisine en formica, et cela faisait fort bien l’affaire ; quant aux entournures un peu délicates des chemises, nous les faisions glisser sur une "jeannette" et disparaître les plis à l’aide d’une patte-mouille.

Or ne lésinant pas sur les moyens de montrer ma reconnaissance, j’avais déjà dressé sur la table de cuisine les bols à déjeuner, le pain, le beurre et la confiture…

J’enlevai avec soin la soupière de faïence et la jolie nappe de dentelle et c’est donc sur la table de salle à manger que je m’installai pour repasser mon pantalon, en insistant vigoureusement sur le pli que je voulais impeccable pour l’occasion.

Le résultat était je dois le dire, plus que probant, et j’avais d’autant plus toutes les raisons d’être fière de mon œuvre, que c’était la première fois que je prenais le fer dans les mains.

Après l’avoir déposé sur le rebord de l’évier de la cuisine, je posai délicatement le vêtement sur le dossier d’une chaise et repliai la couverture, ce qui me permit de découvrir avec horreur, une énorme trace blanche de la forme du fer sur la magnifique table en bois rustique.
En larmes, j’y appliquai immédiatement de la cire en espérant voir la tâche disparaître… Peine perdue !

Je savais qu’avec maman, faute avouée est à moitié pardonnée, j’allai donc, avec des yeux d’épagneul privé de chasse, la réveiller et lui annoncer mon méfait.
Elle enfila son peignoir et ses pantoufles sans hâte et sans parole, ce qui me parut être bon signe, et descendit constater les dégâts.
Elle dit simplement en soupirant "ce qui est fait est fait", et moi je me sentis tout à coup respirer mieux, l’espace d’un instant… d’un très court instant.

Je la vis ouvrir mon cartable et y prendre dans le carnet de correspondance, l’autorisation et le chèque et les déchirer devant mes yeux en disant "I am sorry mais l’Angleterre, ce sera pour une prochaine fois !"

Je n’ai plus jamais porté ce maudit pantalon que j’ai tant haï, et ce n’est que plus de quinze ans plus tard que j’ai eu l’occasion d’aller à Londres.

Aujourd’hui encore, quand je m’installe le fer à la main devant ma table à repasser, j’avoue que de temps en temps, l’image d’un sous-marin jaune s’enfonçant dans la Mer du Nord, embue toujours mes yeux…

"We all live in our yellow submarine,
Yellow submarine, yellow submarine…"  


Claudie Becques



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