AU-DELA DE LA HAINE
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Bien qu’accueillie à bras ouverts par les trois autres femmes de ma vie, ma douce chérie n’avait sans doute jamais pu effacer ce sentiment de ne pouvoir s’intégrer dans ce cercle féminin.
Une drôle de jalousie devait sans doute insidieusement animer de manière différente chacune d’entre elles, qui tenait à s’approprier de manière exclusive mes égards. J’avais beau essayer de me répartir au mieux de ces quatre formes d’amour, je sentais bien que je n’arriverais jamais à combler leurs attentes.
Je tentais alors, le cœur écartelé, en faisant le clown comme à l’habitude, de dérider la moue boudeuse de l’une ou de l’autre. En y repensant un peu plus tard lorsque chacun avait repris le cours de sa vie « normale » j’en éprouvais une immense tristesse.
Anaïs trouva donc ensuite généralement un prétexte pour ne plus avoir à se joindre à chacun de mes retours dans le Nord, que du coup j’écourtais encore un peu plus.
Je crois que j’aurais aimé quelques regrets de la part de ma mère et mes sœurs de son absence, mais les quelques simples mots de politesse compréhensive ne parvenaient pas à effacer la frustration que je ressentais face à cette indifférence vis-à-vis de ma femme, qui, il est vrai, à part moi, n’avait aucun centre d’intérêt commun avec elles trois.
La naissance de Thomas eut un effet bénéfique sur ce point.
Il faut dire que pour voir l’enfant, il fallait également recevoir la maman…
Cela valait bien quelques efforts…